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Comment valoriser la diversité et l’inclusion dans l’industrie ? (Débat)

A l’occasion de la 11e édition de Big, grand rendez-vous business d’Europe, qui se tient ce mardi 23 septembre à l’Accor Arena Paris, La French Fab vous partage une rencontre autour des enjeux de diversité et d’inclusion dans l’industrie, lors de la dixième édition de Big, au sein de la Bulle French Fab.

La transformation de l’industrie passe aussi par une réinvention de ses modèles humains. Cela, devant passer par deux axes : la place des femmes dans un secteur qui peine encore à les attirer, et l’inclusion du handicap cognitif. Lors de la rencontre « Valoriser la diversité et l’inclusion dans l’industrie », qui s’est tenue au sein de la Bulle French Fab, lors de la dixième édition de Big, les intervenants présents – Virginie Boissimon-Smolders, présidente d’IPM France, Julie Bodin, directrice générale de Bouge ta boîte et Stéphane Gilbert, directeur adjoint de la Fondation AMIPI – Bernard Vendre ont mis en lumière les démarches concrètes menées par des entreprises engagées pour rendre leurs organisations plus ouvertes, inclusives et performantes. Loin d’être uniquement sociales, ces actions s’inscrivent dans une stratégie industrielle gagnante, structurée autour de l’humain, de l’innovation et de la compétitivité.

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Promouvoir les femmes dans l’industrie : inclusion, leadership féminin et attractivité des métiers industriels

Virginie Boissimon-Smolders, présidente d’IPM France, rappelle que seulement 2,6 % des PME et ETI industrielles sont dirigées par des femmes. Dans l’ensemble du secteur, elles ne représentent que 24 % des effectifs. Pourtant, IPM France atteint aujourd’hui 34 % de femmes dans ses équipes, preuve qu’une politique volontariste peut faire bouger les lignes. Pour Julie Bodin, directrice générale de Bouge ta boîte, les freins sont multiples : sociaux, culturels, législatifs, mais aussi liés aux stéréotypes qui conditionnent encore les choix d’orientation, les parcours professionnels et les représentations du travail industriel. La sensibilisation joue un rôle crucial : témoignages dans les écoles, mentorat bien encadré, binômes mixtes lors des recrutements, ou encore exigence de parité dans les viviers de candidatures.

Ces actions sont accessibles, concrètes et efficaces pour amorcer le changement. Au-delà de la parité, l’enjeu est bien de libérer le potentiel humain de l’industrie en élargissant l’accès aux carrières et en installant une culture d’entreprise plus inclusive. C’est aussi un enjeu d’attractivité, de fidélisation et de performance, dans un contexte où la rareté des compétences devient un enjeu critique pour la croissance.

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Inclure le handicap cognitif : insertion professionnelle, apprentissage et performance sociale en milieu industriel

Stéphane Gilbert, directeur adjoint de la Fondation AMIPI – Bernard Vendre, présente un modèle unique en France, qui s’appuie sur une activité industrielle réelle pour former et insérer durablement des personnes en situation de handicap cognitif. Avec six usines dans l’Ouest de la France et plus de 650 salariés en situation de handicap, la Fondation démontre qu’il est possible de concilier performance industrielle et impact social. L’approche repose sur deux piliers : la plasticité du cerveau, qui permet d’apprendre à tout âge, et la psychologie mimotique, où chaque collaborateur apprend d’un modèle bienveillant. Cette organisation par binômes et cette logique d’apprentissage permanent structurent une montée en compétence progressive, sécurisée, jusqu’à la signature d’un CDI en entreprise dite classique.

Chaque année, 20 à 25 collaborateurs quittent la Fondation pour rejoindre le marché du travail, avec un taux de réussite de 80 %. L’impact est mesurable : plus de 20 millions d’euros d’économies annuelles pour la société, en favorisant l’autonomie et en réduisant le chômage de longue durée. L’insertion réussie de ces profils repose sur un accompagnement de proximité, une organisation adaptée, mais aussi une vision forte de l’entreprise sur son rôle social, économique et citoyen.

Lutter contre les stéréotypes : transformer la culture d’entreprise pour favoriser la diversité et l’égalité des chances

La diversité, qu’elle soit de genre, de parcours ou de capacité, se heurte encore à des croyances ancrées dans les mentalités. L’idée que certaines fonctions ne seraient pas faites pour les femmes, ou que le handicap serait un frein à la performance, freine la transformation des organisations. Pour Julie Bodin, tout commence par une prise de conscience individuelle, puis collective. Mais cette prise de conscience doit être suivie d’actes concrets : imposer la parité dans les candidatures, adapter les outils de travail, investir dans la formation des recruteurs, ou encore structurer le mentorat pour éviter les effets de reproduction. L’exemple d’une entreprise de transport confrontée à un manque de conducteurs illustre cette dynamique : en adaptant ses camions à tous les gabarits, elle a pu élargir son vivier de talents.

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Virginie Boissimon-Smolders complète : l’inclusion doit être pensée dès l’éducation, dès l’école, et jusqu’aux conseils d’administration. Chez IPM France, cela passe aussi par des équipes pluridisciplinaires, la mise en valeur de rôles modèles et une stratégie RSE fondée sur l’écoconception, le numérique responsable et la diversité. La lutte contre les biais devient ainsi un enjeu stratégique de transformation.


Faire de la diversité un levier stratégique : actions RH, RSE et gouvernance au service de la performance industrielle

Loin d’être un engagement à la marge, la diversité devient un levier stratégique pour renforcer la performance globale de l’entreprise. Julie Bodin insiste : ce sujet ne doit pas être traité uniquement sous l’angle de la responsabilité sociale, mais bien comme un facteur de compétitivité. Une entreprise qui intègre la diversité dans ses pratiques gagne en efficacité, en capacité d’innovation, en attractivité et en fidélisation. Les mesures proposées sont pragmatiques : mentorat accompagné, binômes mixtes, exigence de parité dans les viviers de candidatures, formations anti-biais, adaptation des postes de travail, structuration de parcours inclusifs.

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Virginie Boissimon-Smolders évoque la stratégie RSE d’IPM France fondée sur quatre piliers, dont la diversité : en incluant dès la conception l’accessibilité des bornes, en s’engageant sur le numérique responsable, ou en collaborant avec les territoires sur des projets de santé connectée. Ces actions créent une dynamique d’engagement collectif, attirent de nouveaux talents et renforcent le lien entre l’entreprise et son écosystème. En parallèle, la Fondation AMIPI démontre que l’inclusion du handicap est compatible avec des exigences industrielles fortes, en travaillant pour des clients comme Renault ou Stellantis. La performance sociale rejoint ici pleinement la performance économique. Renforcer la culture d’inclusion : politique RH, handicap invisible et engagement pour un recrutement responsable Pour attirer des profils divers, les entreprises doivent afficher clairement leur ambition en matière d’inclusion.

Repositionner l’inclusion comme un facteur de performance

Julie Bodin souligne que cette clarté — être entreprise à mission, certifiée B Corp — permet d’attirer des talents sensibles aux enjeux de sens. Cette posture affirmée rassure, autorise la parole et encourage les personnes concernées à se déclarer. Le handicap invisible, en particulier, reste encore tabou. Seule une entreprise perçue comme accueillante permettra aux collaborateurs de se sentir suffisamment en confiance pour évoquer leurs singularités. La cohérence entre discours et actions est essentielle. Cela passe par la formation des managers, la sensibilisation continue, l’écoute des équipes et l’adaptation des pratiques. Chez IPM France, la gestion des situations de handicap se fait dans le respect de la confidentialité, en accord avec les souhaits de la personne concernée. Pour la Fondation AMIPI, il s’agit aussi de structurer des parcours de formation évolutifs, avec des accompagnements adaptés à chaque profil. Enfin, pour convaincre les décideurs, il est indispensable de repositionner l’inclusion comme un facteur de performance, et non comme un simple engagement humaniste. C’est en intégrant cette réalité économique que l’entreprise pourra faire de l’inclusion un pilier stratégique.

Les témoignages réunis démontrent qu’il est non seulement possible, mais surtout bénéfique d’intégrer les principes d’inclusion et de diversité dans les modèles industriels. Qu’il s’agisse de la place des femmes ou de l’intégration du handicap cognitif, ces actions renforcent la performance opérationnelle, répondent aux enjeux de recrutement et enrichissent la culture d’entreprise. À condition d’être portées par une direction engagée, structurées dans une stratégie globale et accompagnées sur le terrain, elles deviennent de puissants leviers de transformation. L’industrie de demain sera inclusive, ou elle se privera d’une grande partie de son potentiel humain. Aux dirigeants de tracer cette voie, pour conjuguer impact, innovation et compétitivité.

 

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